Le parquet a requis cinq ans de prison et d’inéligibilité contre Marine Le Pen, accusée de détournement de fonds européens via des emplois fictifs d’assistants parlementaires au sein du RN.
Le Pen – CREDIT : Capture d’écran France 2
Mercredi 13 novembre, le parquet de Paris a requis cinq ans de prison, dont deux ans ferme aménageables, ainsi qu’une peine de cinq ans d’inéligibilité contre Marine Le Pen dans le cadre du procès des assistants parlementaires européens du Rassemblement national (RN), anciennement Front national (FN). Cette demande intervient après un mois et demi d’audience au cours desquelles 24 autres prévenus, cadres et ex-députés européens du parti, ont également été jugés. Le parquet a demandé une amende de 300 000 euros pour la présidente du RN, et souhaite que l’inéligibilité soit appliquée dès la condamnation, même si un appel est interjeté.
Les réquisitions : une peine ferme pour Marine Le Pen
Le parquet a soutenu que Marine Le Pen, députée européenne de 2004 à 2017 et cheffe du parti depuis 2011, aurait mis en place un système de « détournement de fonds publics » en utilisant des fonds européens pour salarier des assistants parlementaires fictifs. Ces derniers auraient en réalité travaillé pour le parti en France, et non pour l’Union européenne, selon l’accusation. Le parquet a demandé une peine de prison pour la candidate à trois reprises aux élections présidentielles, soulignant la gravité des faits. La peine de cinq ans d’inéligibilité demandée, assortie d’une exécution provisoire, aurait pour conséquence directe d’empêcher Marine Le Pen de se présenter aux prochaines élections.
Un système organisé de détournement de fonds publics
Les procureurs ont décrit, dans leurs réquisitions, un « système organisé » de détournement, qui aurait permis au Front national de réduire ses dépenses en utilisant les enveloppes mensuelles allouées aux députés européens pour embaucher des assistants censés travailler pour les institutions européennes. Selon le parquet, ces assistants, au nombre de douze, n’auraient pas exercé les fonctions stipulées dans leurs contrats. Les procureurs ont notamment mis en avant des preuves issues de la correspondance interne du parti, où les mots « montages financiers » et « transferts d’assistants » apparaissent, indiquant que ces assistants étaient déplacés en fonction des disponibilités budgétaires.
En 2014, alors que le parti faisait face à des difficultés financières, le trésorier de l’époque, Wallerand de Saint-Just, aurait écrit dans un mail interne : « Nous ne nous en sortirons que si nous faisons des économies importantes grâce au Parlement européen. » Selon les procureurs, ce type de correspondance illustre la volonté d’exploiter les dotations européennes pour financer le fonctionnement interne du FN.
Réaction de Marine Le Pen et du Rassemblement national
Marine Le Pen a vivement réagi aux réquisitions, dénonçant une « violence » et une « outrance » de la part du parquet. Elle a accusé la justice de chercher à « priver les Français de la capacité de voter pour ceux qu’ils souhaitent » et de tenter de « ruiner » son parti en lui imposant des sanctions financières et électorales sévères. Cette réaction a été soutenue par des figures de l’extrême droite en France et en Europe, notamment Jordan Bardella, président du RN, qui a accusé le parquet d’« acharnement » et de vouloir empêcher les partisans de Le Pen de voter pour elle en 2027.
Une sanction financière lourde pour le RN
Outre les peines de prison et d’inéligibilité requises contre les prévenus, le parquet a également demandé une amende de 4,3 millions d’euros contre le RN, dont 2 millions avec sursis. Cette sanction vise à couvrir les fonds que le Parlement européen estime avoir été détournés par le parti entre 2004 et 2016. Le Parlement avait initialement évalué ce préjudice à 4,5 millions d’euros, une somme qui inclut des remboursements partiels effectués par le parti au cours des années.
Un procès aux enjeux politiques
Ce procès, au-delà de ses répercussions judiciaires, revêt un enjeu politique majeur. En cas de condamnation, Marine Le Pen se verrait exclue de la scène politique pour une durée de cinq ans, compromettant ainsi sa candidature potentielle à la présidentielle de 2027. Les procureurs ont insisté sur le fait que la loi s’applique à tous, quelles que soient les ambitions politiques des accusés. Le jugement, attendu dans les mois à venir, pourrait avoir des répercussions importantes sur l’avenir du RN et de Marine Le Pen elle-même.